Pendant les vacances je me suis farci
Belle du Seigneur, d'Albert Cohen.
C'est au sujet de la façon d'aimer et les risques qu'entraînent certaines façons d'aimer sur l'amour en lui même. Donc au final, c'est un livre sur l'amûûûûr.
Je n'aime pas l'héroïne, car comme m'a si bien dit Fiddler, "elle fait sa Bovary".
Faut vous dire que j'exècre Emma Bovary et même si je pouvais je la chierais par l'urètre, ça lui ferait du bien à cette pimbêche. En plus comme c'est un personnage, je peux me le permettre, mon anatomie n'en souffrirait pas.
Donc je n'aime pas l'héroïne, mais j'aime bien les personnages gouailleurs comme Mariette la boniche ou la tripotée d'oncles du héros, Solal des Solal (ça pète comme nom, j'aime bien).
Voulant faire de leur amour un amour des légendes, sacré, pur et exempt de toutes les basses réalités terrestres (du genre "attends chéri j'vais caguer un bon coup j'ai la taupe qui pousse") , ils ont étouffé leur amour et se sont dégoûtés d'eux mêmes. Ils se suicident. Eh oui, s'évertuer à respecter son utopie, se nier soi-même en tant qu'être physiologique, ça fait mal.
Ils ont tué la spontannéïté, ces sagoins !!!
Et le pire c'est que la fille est plutôt chaudasse et comme elle est un peu gênée de se l'avouer et de l'avouer à son Seigneur, son dieu sacré, elle justifie sans arrêt ses activités copulatoires en n'en parlant que comme d'un truc hautement spirituel, genre réunion des âmes bouleversante et patati patata et en n'en parlant que sous l'aspect spirituel alors que l'aspect physique c'est quand même ce qui la préoccuppe le plus. Quelle faux-cul je vous jure.
Et puis c'est facile d'aimer quelqu'un quand on ne le voit qu'en tenue de soirée, toujours tout frais lavé, tout frais rasé. Mais est-ce que c'est un amour qui résiste aux ronflements, aux pets, aux rots, aux vomis, aux vidanges nasales, à la mauvaise haleine du matin ? Ils n'ont pas voulu passer ces épreuves. Snobisme ou manque de courage ?
Pourtant, c'est la vie, de roter, chier, péter...On ne peut pas nier cette partie-là de notre vie, c'est impossible de s'en passer.
Albert Cohen est très taquin avec l'héroïne, notamment dans une scène où la morve menace de discréditer ses airs de digne femme du monde et une scène de borborygmes devant son sacré seigneur. J'ai beaucoup ri. La fin du bouquin est très intelleigente car au moment de mourir ils sont très tendres l'un pour l'autre et du coup on se dit que c'est vraiment du gâchis : ils se sont aimés même à la fin et ils ont fait de leur couple du grand n'importe quoi. Alors qu'ils auraient pus vivre heureux. Mais non, "un amour de rêve sinon rien". Pfff ahlala. Comme quoi l'amour ne suffit pas au couple.
Dans ce bouquin se glisse en filigrane le message qu'on trouve dans La Charogne de Baudelaire, et sûrement aussi dans le prologue de Borborygmes de Valéry Larbaud. (même si A.Cohen nie tout héritage)
Je trouve qu'Albert Cohen est très rock n'roll. Ne vous méprenez pas sur le message du bouquin , ce n'est pas "l'amour impossible". Il a dédié Belle du Seigneur à sa femme.
J'ai trouvé un jugement d'un journaliste sur ce roman, je vous le cite car je l'apprécie :
- Citation :
- C'est un livre extraordinaire , irritant , magnifique , propre à déclencher les passions... C'est un livre fait pour casser l'orgueil . Pour casser tout. Au passage, et dans son pessimisme absolu, il ramène à zéro la passion sexuelle... Je crois saisir en cet esprit très religieux, très religieusement juif d'Albert Cohen, un immense désir de pureté. Qu'on soit ou non d'accord sur le principe sous-jacent, on constatera que ce n'est pas là un des aspects les moins intéressants du livre.
Jean Freustié, Le Nouvel Observateur, décembre 1968
J'allais oublier de dire qu'il est très bien écrit. L'écriture est daptée aux différents parlés, aux différentes situations. Parfois on découvre des jeux de répétitions, ça donne des passages qui se situent entre le genre du roman et celui de la poésie.
C'est vraiment très bien, franchement je donne sans hésiter au moins 19/20.
Il faut lire ce bouquin !
Surtout le faire lire aux écervelées qui prennent la vie pour un roman Arlequin ! (car c'est plus accessible que Madame Bovary, tout en allant plus loin)